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La crise sanitaire liée au Covid-19 a considérablement impacté l’activité de bon nombre d’entreprises et de ce fait, leur situation financière.
Le dispositif d’activité partielle mis en œuvre par le Gouvernement a permis temporairement de soutenir l’emploi.
Toutefois, les difficultés sont parfois telles que des licenciements économiques pourraient être envisagés dans les semaines ou mois à venir afin de préserver la compétitivité et la trésorerie de l’entreprise.
Pourtant, d’autres dispositifs légaux existent et sont susceptibles de permettre de faire face à des difficultés financières temporaires ou persistantes.
Parmi ces dispositifs à privilégier, l’accord de performance collective (APC), créé par l’une des ordonnances « Macron » du 22 septembre 2017.
Ces accords se substituent à trois types auparavant existants :
Les accords de maintien dans l’emploi
Les accords de préservation ou développement de l’emploi
Les accords de mobilité interne
Les APC fusionnent ces trois accords tout en supprimant la contrainte de devoir justifier de difficultés économiques, c’est pourquoi ils peuvent être un allié de taille pour les entreprises, dans la gestion de la crise.
LA NEGOCIATION DE L’ACCORD
Quels sont les motifs de recours ?
En application de l’accord L. 2254-2 du Code du travail, l’accord peut être conclu pour deux motifs :
« Afin de répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise » ;
« En vue de préserver, ou de développer l’emploi ».
Ces motifs sont relativement larges et à ce jour, aucune précision complémentaire n’a été apportée par la jurisprudence ou l’administration quant à l’appréciation de ces motifs en pratique.
Il appartiendra donc à l’entreprise et aux partenaires sociaux, lors de la négociation de l’accord, de veiller à la rédaction du préambule et du motif de recours afin qu’il soit explicite quant aux difficultés rencontrées.
En effet, la pertinence du motif de recours pourra être contestée devant le Tribunal Judiciaire.
Avec qui conclure cet accord ?
En principe, l’APC doit être conclu avec les délégués syndicaux au sein de l’entreprise. Dans cette hypothèse, les règles de conclusions des accords collectifs majoritaires s’appliquent.
En l’absence de délégué syndical dans l’entreprise, il peut être négocié avec la délégation du personnel au CSE.
En l’absence de CSE, dans les entreprises de moins de 20 salariés, il peut être établi par l’employeur. Il sera toutefois soumis à la validation des salariés au 2/3.
LE CONTENU DE L’ACCORD
En application de l’article L. 2254-2, un APC peut :
Aménager la durée du travail, ses modalités d’organisation et de répartition ;
Aménager la rémunération dans le respect des salaires minima hiérarchiques ;
Déterminer les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise.
L’aménagement de la durée du travail
La négociation doit s’effectuer dans la limite des dispositions impératives du Code du travail relatives à la durée du travail.
Sous réserve de respecter ces dispositions légales, les parties à la négociation ont donc toute latitude pour augmenter, abaisser ou moduler la durée du travail des salariés.
On peut toutefois légitimement s’interroger sur les possibilités d’aménagement pour les salariés en forfait-jours.
En effet, par principe, l’employeur ne peut imposer un forfait-jour à un salarié sans que ce dernier ne signe une convention individuelle.
C’est pourquoi il convient de faire la distinction entre deux situations :
Si la convention de forfait est déjà existante et que l’APC le modifie : il n’est pas nécessaire de formaliser la modification ;
Si le salarié n’est pas soumis à un forfait-jours mais que l’APC prévoit la mise en œuvre d’un forfait : la jurisprudence n’a pas tranché la question, c’est pourquoi il serait préférable de recueillir l’accord du salarié.
La rémunération
A titre préliminaire, il convient de préciser que la rémunération pouvant être aménagée correspond :
Au salaire ou au traitement ordinaire de base ou minimum ;
Ainsi que tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèce ou en nature.
L’objet de la négociation est large, il sera par exemple envisageable d’abaisser la rémunération du salarié. En revanche, elle devra s’effectuer dans la limite des minima conventionnels applicables à l’entreprise.
La mobilité professionnelle ou géographique
A ce sujet, l’APC peut déterminer les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise, sans qu’aucune restriction ne soit prévue par les dispositions du Code du travail. La liberté des parties dans la négociation est donc totale.
Les autres mesures
Au-delà des trois thèmes principaux de la négociation visés ci-dessus, l’accord peut également prévoir les mesures suivantes :
Les modalités d’information des salariés sur son application et son suivi pendant toute sa durée, ainsi que, le cas échéant, l’examen de la situation des salariés au terme de l’accord ;
Les conditions dans lesquelles les dirigeants salariés, mandataires sociaux et actionnaires fournissent des efforts proportionnés à ceux demandés aux salariés pendant toute sa durée ;
Les modalités selon lesquelles sont conciliées la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale des salariés ;
Les modalités d’accompagnement des salariés ainsi que l’abondement éventuel du compte personnel de formation au-delà du minimum légal.
LES EFFETS DE L’APC
L’information des salariés concernés
L’employeur doit informer par tout moyen conférant date certaine et précise l’existence et le contenu de l’accord les salariés, ainsi que de leur droit d’accepter ou refuser l’application de l’accord à leur contrat de travail.
Les salariés disposent d’un délai d’un mois pour se prononcer, leur silence à l’issue de ce délai vaut acceptation.
L’acceptation du salarié
Si le salarié accepte l’application de l’accord, ce dernier se substitue de plein droit aux clauses contraires et incompatibles du son contrat de travail, y compris en matière de rémunération, de durée du travail et de mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise.
De ce fait, aucun avenant au contrat de travail n’est nécessaire.
Les modifications sur le contrat de travail seront effectives pendant toute la durée de l’application de l’accord. Il sera donc préférable que la négociation prévoit les conséquences de l’expiration de l’accord sur le contrat de travail.
Le refus du salarié
Le refus du salarié devra être express, et rédigé par écrit.
Si le salarié refuse, l’employeur pourra licencier le salarié.
Conformément aux dispositions du Code du travail, le licenciement sera réputé fondé sur une cause réelle et sérieuse.
L’employeur disposera alors de deux mois pour engager la procédure.
Il convient de préciser que pour les salariés protégés il sera nécessaire de respecter la procédure spécifique en sollicitant l’autorisation de licencier auprès de l’inspecteur du travail.
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Pour conclure, l’accord de performance collective est un outil de gestion de crise, dans le cadre de difficultés économiques présentant de nombreux avantages, de simplicité de conclusion et de latitude de négociation.
En complément de la conclusion d’un APC, la possibilité de recourir au dispositif de l’activité partielle est toujours envisageable. Un projet de loi, ainsi qu’un décret d’application devraient être publiés très prochainement afin d’instaurer un nouveau dispositif applicable à compter du 1er juillet 2020 : l’activité réduite pour le maintien en emploi (ARME).
Ce dispositif est le successeur de l’activité partielle et nous ne manquerons pas de vous détailler les contours de sa mise en œuvre une fois les règles définitives publiées officiellement.
N’hésitez pas à nous contacter si vous souhaitez engager une réflexion sur l’APC au sein de votre entreprise.
Géraldine CHICAL & Marine GIRAUD
Avocates à la Cour
geraldine.chical@chical-avocats.com
marine.giraud@chical-avocats.com